Richard
Weikart
Recension par John Woodmorappe - Traduction, Fabrice Bect
Recension par John Woodmorappe - Traduction, Fabrice Bect
L'auteur fournit une analyse rigoureuse de la compréhension qu'avait Hitler de
"Dieu." Il examine également tous les arguments pour et contre les
différentes idées sur les croyances religieuses de Hitler ou sur leur absence.
Weikart met en garde, à juste titre, contre les déclarations isolées d’Hitler
afin de tirer des conclusions sur ses convictions. Au lieu de cela, il faut
regarder les thèmes principaux des déclarations d’Hitler et accorder plus de
poids à ses propos privés qu'à ses commentaires publics.
Le Hitler public et le Hitler privé
Ce que les
politiciens disent, et ce qu'ils pensent réellement, sont souvent deux choses
très différentes. Il n'est pas surprenant que Hitler, ayant à faire à une
nation allemande encore largement chrétienne - ne serait-ce que culturellement
- se soit également qualifié de chrétien. Pour la même raison, Hitler a
périodiquement invoqué des thèmes chrétiens et s'est généralement abstenu de
faire des déclarations sévères sur le christianisme. En outre, certains nazis,
y compris Hitler, ont conservé leur appartenance à une église même s’ils n’y
croyaient pas.
«L'auteur
fournit une analyse rigoureuse de la compréhension qu'avait Hitler de
"Dieu".
En privé, Hitler a souvent exprimé son hostilité envers le christianisme et l'église. Cependant, Weikart met en garde sur le fait qu'Hitler a souvent dit aux gens, de son entourage, ce qu'ils voulaient entendre.
En privé, Hitler a souvent exprimé son hostilité envers le christianisme et l'église. Cependant, Weikart met en garde sur le fait qu'Hitler a souvent dit aux gens, de son entourage, ce qu'ils voulaient entendre.
Hitler a
déclaré à Christa Schroeder, sa secrétaire personnelle, que l'église était une
institution obsolète et étouffante. Hitler a également déclaré à deux de ses
proches et associés, Otto Strasser et Walter Schellenberg, qu'il ne croyait pas
en Dieu. Il est difficile de comprendre pourquoi Hitler penserait que ces
responsables "voulaient entendre" qu'il était quelqu'un qui rejetait
l'église et un athée. En tout état de cause, l'exact opposé était le cas. Notez
qu'Otto Strasser a rompu avec Hitler, déjà en 1930, parce que Strasser croyait
que sans le christianisme, l'Europe était perdue et que Hitler était athée).
Maintenant, si Hitler disait toujours à ses proches collaborateurs "ce
qu'ils voulaient entendre," il aurait dit à Strasser qu'il était un
chrétien dévot, et certainement pas qu'il était athée!
"Dieu" peut signifier beaucoup de choses différentes
De nos
jours, en Occident, la plupart des gens sont bibliquement illettrés et ont
différentes conceptions de "Dieu". Un athée peut même dire: "Je
crois en Dieu, car Dieu est la plus grande invention de l'humanité."
Cependant, cela n'a rien de nouveau. Même au 19e - et 20e siècle en Europe, il
existait de nombreuses notions différentes de "Dieu", dont beaucoup
étaient en contradiction avec les enseignements bibliques à Son sujet. Il y
avait de nombreuses raisons pour cela. D'une part, en raison de la force
résiduelle du théisme, ceux qui ont rejeté Dieu préféraient généralement le
redéfinir plutôt que le désavouer ouvertement.
Deuxièmement,
le développement de la haute critique et du modernisme, tous deux lancés en
Allemagne, a rendu assez facile la dé-littéralisation de Dieu et des éléments
chrétiens. Par exemple, la "seconde venue du Christ" anticipée a été
reformulée en tant que dévotion personnelle à Christ au moment de la mort.
Cette dé-littéralisation et flexibilité forcée de Dieu et des éléments
chrétiens ont, à leur tour, facilité la cooptation de ceux-ci, sous de nouveaux
sens résolument non conventionnels, aux fins de ce qui est finalement devenu
l'idéologie nazie.
Hormis les
tentatives délibérées d'induire le peuple allemand en erreur, il est assez
banal qu'Hitler ait parfois sombré par inadvertance dans la terminologie
chrétienne, qu'il ait mélangé des mèmes chrétiens et nazis et qu'il ait parfois
même semblé adhérer à des croyances chrétiennes. Après tout, Hitler avait eu
une éducation catholique. Pour toutes les raisons qui précèdent, il n’est pas
surprenant que les déclarations de Hitler à propos de Dieu semblent
contradictoires. Sa réutilisation idiosyncratique de la terminologie théiste et
chrétienne à ses propres fins est encore moins surprenante. Examinons certaines
d'entre elles.
Qui (ou qu') était "Dieu" pour Hitler?
Hitler a
fréquemment utilisé les mots "providence" et
"tout-puissant", mais il faisait en réalité référence au destin.
Telle était la conclusion des autres nazis Alfred Rosenberg et Hans Frank,
pendus à Nuremberg. (Je me souviens que, lorsque j'ai lu Mein Kampf pour la
première fois à l'adolescence, il y a quelques décennies, les fréquentes
allusions de Hitler au destin m'avaient frappé.)
Parfois,
cependant, Hitler donnait l'impression qu'il croyait que l'histoire avait été
prédéterminée. Cependant, cela n'implique pas le théisme, du moins pas
nécessairement. En fait, il n’est pas rare que des personnes, surtout dans une
situation désespérée, imaginent un résultat quelconque prédéterminé, impliquant
Dieu ou pas, là où il n’y en a pas. Un exemple évident, concerne la réaction de
Hitler à l'annonce de la mort du président américain Franklin D. Roosevelt en
avril 1945. Hitler s'est leurré en concluant que "Dieu" était
intervenu pour le compte de l'Allemagne nazie à la dernière minute, causant
l'effondrement imminent de l'effort de guerre des Alliés, permettant ainsi à
l'Allemagne de s'arracher la victoire à l'ennemi.
La plupart
du temps, quand Hitler priait, il le faisait dans le sens où celui qui prie
serait inspiré pour résoudre ses propres problèmes. (De nos jours, cela est
souvent verbalisé comme "Aide-toi et le ciel t'aidera".) À d'autres
moments, cependant, il semblait superficiellement qu'Hitler priait vraiment, un
dieu personnel, pour la délivrance.
Cependant, il n’est pas rare que même les
athées fassent des prières à Dieu dans des situations difficiles, d'où le
dicton "il n'y a pas d’athées dans les tranchées".
Incroyablement,
certains commentateurs ont non seulement prétendu que Hitler était théiste,
mais également qu'il était créationniste - tout cela parce qu'il faisait
parfois référence à un créateur de l'univers. Une analyse minutieuse de l'utilisation
de ce terme par Hitler élimine cette allégation idiote.
Dans son infâme Mein
Kampf, Hitler utilise "créateur" en référence à la nature. Cela est
également conforme à sa déification de la nature dans de nombreux autres
contextes. Ainsi, quand Hitler a dit que l'homme a été créé "à l'image du
créateur", il voulait dire que l'homme a été créé à l'image de la nature
déifiée.
Hitler n'était pas chrétien
Hitler
disait parfois que Jésus était "son seigneur et son sauveur" et qu'il
"se battait pour l'œuvre du seigneur." Dans le contexte, il est
évident qu’Hitler faisait référence à la nature déifiée. Dans la pensée tordue
d’Hitler, Jésus était le sauveur dans le sens où Il était venu pour sauver le
monde des Juifs. Hitler pensait que Jésus-Christ avait tenu tête aux Juifs, à
leur avarice et à leur matérialisme et, pour cette raison, les Juifs l'ont fait
mettre à mort.
Hitler
rejetait complètement le miraculeux. En outre, Hitler rejetait toutes les
doctrines chrétiennes, y compris la résurrection de Jésus-Christ, et ne croyait
pas une vie après la mort (sauf dans le sens redéfini de la persistance du
Volk), même quelques semaines avant son suicide.
Le modèle de
la pensée d'Hitler est indéniable. La plupart des historiens s'accordent pour
dire qu'Hitler n'était pas chrétien au vrai sens du terme".
Hitler le panthéiste / Hitler l'athée
Les
utilisations fréquentes par Hitler du terme "dieu" signifient
qu'Hitler ne peut pas être considéré comme athée. Alors, quel terme décrit le
mieux les croyances d'Hitler? Le terme qui définit le mieux Hitler est celui de
panthéiste - une conclusion à laquelle sont parvenus également auparavant
d'autres chercheurs.
Examinons
cela de plus près. Le panthéiste croit que "tout est dieu."
Maintenant, si tout est dieu, cela signifie que rien en particulier n'est dieu.
Cela signifie aussi certainement qu’aucun Être Suprême personnel et
transcendant n’existe. C'est ce qui définit l'athéisme.
Les
définitions modernes de l'athéisme ne font que renforcer ce point. Dans le
passé, l'athéisme était généralement compris comme une décision consciente et
délibérée de ne pas croire l'existence de Dieu. De nos jours, cependant, une
simple absence de croyance en Dieu suffit pour faire de quelqu'un un athée
(selon une définition intéressée qui supprime leur fardeau de la preuve). Sur
cette base, il est dit que chaque enfant est né athée, et le reste jusqu'à ce
qu'il ou elle soit endoctriné dans la croyance en Dieu. (En fait, les
recherches montrent que la position par défaut des enfants est de considérer le
monde comme le produit d'un dessein, et qu'un endoctrinement est nécessaire
pour rejeter cela. Puisqu'Hitler ne croyait pas en un être suprême
transcendant, personnel, il était, selon la nouvelle définition, un athée.
Hitler, l'occultisme et le néo-paganisme
Tout
d’abord, il n'y a pas de contradiction entre être athée et être impliqué dans
l'occultisme ou dans le néopaganisme. En fait, être athée ne signifie pas qu'on
ne croit en rien. Cela signifie que l'on peut croire en n'importe quoi (sauf
Dieu, bien sûr).
Les premiers
mouvements racistes proto-nazis en Allemagne se croisaient avec le mysticisme
et l'occultisme, mais n'étaient pas centrés sur eux. La même chose peut être
dite d'Hitler. Il avait des livres sur l'occultisme dans sa bibliothèque, et au
moins une fois a pratiqué la radiesthésie, mais il n'y a aucune preuve
systématique qu'Hitler ait été profondément impliqué dans l'occultisme. Pour ce
qui est des autres nazis de premier plan, Hess et Himmler ont montré un intérêt
soutenu pour l'occultisme, tandis que Goebbels et Bormann désapprouvaient
l'occultisme. Vers 1941, les nazis ont interdit de nombreuses manifestations
publiques de l'occultisme, l'astrologie, le spiritisme, le théosophisme, et la
parapsychologie inclus
En fait,
l'interdiction par les nazis des pratiques occultes publiques ne signifie pas
nécessairement que le nazisme était anti-occultisme. Les nazis se sont
peut-être opposés à l'utilisation de l'occultisme par le public pour des
raisons élitistes: ils voulaient monopoliser le pouvoir occulte et ne pas le
partager avec les masses populaires. En outre, les autorités nazies craignaient
peut-être qu'une utilisation publique généralisée de l'occultisme devienne une
fin en soi, réduisant ainsi l'emprise de l'idéologie nazie sur l'esprit des
masses.
Les actions
de Heinrich Himmler soutiennent le postulat selon lequel les nazis voulaient
monopoliser l'occultisme, et non pas l'éliminer.
L'un des
aspects les plus étranges de cette campagne anti-occultisme est qu'elle a été
dirigée par les forces de police de Himmler, en dépit de sa propre fascination
pour l'occultisme. En effet, Himmler a libéré l'astrologue Wilhelm Wulff de sa
garde à vue, sous la condition qu'il exerce son art occulte pour Himmler.
Ainsi, il devint l'astrologue personnel de Himmler au moment même où d'autres
astrologues étaient persécutés.
Encore une
fois, il semble que le nazisme se soit croisé avec le néo-paganisme nordique,
mais ne soit pas centré sur lui. Comme avec l'occultisme, il n'y avait pas de
position nazie monolithique à ce sujet. Rosenberg et Himmler voulaient faire
revivre les anciens dieux, rites et sanctuaires germaniques, contrairement à
Hitler. Le côté rationaliste de Hitler est apparu au premier plan. Cela
signifiait que la science moderne et la raison étaient ce qui devait animer le
peuple allemand, et non un retour à des habitudes disparues. En outre, Hitler
pensait que le nazisme devrait insister sur l'action et non sur la
contemplation et le mysticisme.
Enfin, le
néo-paganisme étant répugnant pour de nombreux allemands, Hitler avait la
raison tactique suivante de se distancer du néo-paganisme: Il divisait
inutilement le peuple allemand.