Dans le Coran, le paradis
céleste est un lieu de plaisirs infinis. Le mythe des 72 vierges est exploité
par la propagande djihadiste pour encourager les combattants au sacrifice, les
élevant au rang de martyrs.
Le
mythe des 72 vierges qui attendent chaque martyr au paradis de l’islam ne cesse
de susciter ironie et sarcasme en Occident.
Ce
mythe, l’«un des mythes les plus spectaculaires et fondateurs de l’islam», a
propulsé la question du paradis en islam au cœur de l’actualité. En effet, il
apparaît d’après les techniques d’endoctrinement utilisées par la propagande
djihadiste que nombre de martyrs musulmans prêts à se faire exploser au milieu
d’une foule d’innocents s’attendent à voir les portes du paradis s’ouvrir grand
devant eux et surtout à pouvoir y jouir sans fin de vierges, appelées «houris»,
dont la virginité est éternelle.
Huit portes à franchir
Si le
paradis bénéficie dans le Coran de descriptions parfois précises, détaillant le
vêtement des élus du paradis ainsi que les délices – notamment le vin exquis –
qui attendent les croyants vertueux, ces derniers devront d’abord franchir huit
portes «dont les battants sont séparés par quarante années de marche», et
prendront ensuite place, selon la qualité de leurs œuvres terrestres, dans un
des sept niveaux du séjour des délices, «où leur front brillera de l’éclat de
la félicité» (sourate 83).
La
précision des descriptions frappe toujours les croyants d’aujourd’hui qui
évoquent avec leurs mots ce lieu «où personne ne devra plus travailler. Les
femmes n’auront plus de tâches domestiques, plus de fatigue, elles seront des
dames et les hommes auront pour leur plaisir des vierges», selon un jeune homme
rencontré aux abords de la mosquée du Cinquantenaire à Bruxelles.
La
description des plaisirs charnels réservés aux croyants exalte surtout la
jouissance d’une vie sensuelle sans entrave. A l’heure où le fondamentalisme
multiplie les interdits, le paradis est plus que jamais perçu comme le lieu de
toutes les jouissances que la vie terrestre condamne: femmes, vin, luxure.
Femmes pas jalouses
Soulignons
à cet égard que les croyantes n’y bénéficient d’aucune «récompense sexuelle»
particulière et que le paradis apparaît surtout comme le lieu d’une jouissance
masculine.
«La
femme musulmane deviendra une dame. Les houris sont pour les hommes, mais la
femme ne connaîtra pas la jalousie», explique une Maghrébine, rencontrée à la
mosquée du Cinquantenaire. «Tout y est organisé pour ne pas créer de jalousie.
De toute façon, il peut y avoir entre chaque gynécée une distance comme entre
la terre et la lune.»
Cela
pourrait prêter à sourire si l’imagerie développée autour des 72 vierges
n’amplifiait la vision phallique de l’existence terrestre et n’était utilisée
pour encourager les candidats djihadistes à désirer la mort et à entraîner
également celle d’innocents.
Compensation espérée dans l’autre monde»
Le
paradis en islam est habité par l’image des 72 vierges qui attendent le
croyant, mais aussi le martyr qui se fait exploser au sein d’une foule
d’innocents. Pouvez-vous expliquer ce mythe?
Fethi
Benslama: Le paradis musulman
est décrit avec un luxe de détails comme un lieu de plaisirs infinis pour les
hommes. Tout ce qui est interdit par la loi devient non seulement licite, mais
accessible dans une démesure inouïe et sans conséquences. La jouissance
corporelle et spirituelle s’y entremêle sans interruption. La sexualité y
occupe une place de première importance, dont la promesse d’un grand nombre de
femmes vierges pour les hommes.
Et
qu’en est-il des femmes au paradis?
Les
femmes ne sont pas exclues du paradis. Mais il existe peu de précisions
concernant leurs plaisirs. Leur lot est plutôt celui d’une béatitude
désincarnée. Ainsi, non seulement l’islam continue à conférer dans l’au-delà le
privilège qu’il accorde aux hommes dans la vie, mais de plus, il entretient
l’imaginaire phallique d’un lieu de jouissance absolue pour eux, autrement dit
sans manque, sans loi, donc sans péché.
Quel
est, selon vous, le message que ce paradis envoie aux croyants?
Cette
promesse de jouissance absolue dans l’au-delà a, à mon sens, deux fonctions. La
première est de soutenir la virilité des hommes qui peuvent se projeter dans un
monde sans crainte à ce sujet. La seconde est de les inciter à sacrifier une
part de leurs pulsions dans le bas monde, dans l’espoir d’obtenir une
compensation totale dans l’autre monde.
Cette
espérance les conduit à accepter la mort, car la mort est l’accès à un triomphe
total sur l’ennemi extérieur, mais aussi l’ennemi intérieur de l’homme: son
surmoi, cette instance qui surveille, qui critique, qui contraint, source de la
morale et de la culpabilité, et qui peut être d’une grande cruauté. On voit
donc comment le paradis des hommes dans l’islam a pour fonction le soutien du
surmoi masculin.